Laisser passer la vague...
- Le Sam 24 mai 2014
Parfois, nous retrouvons aux prises avec nos émotions. Comme des lames de fonds, elles surgissent et peuvent même nous envahir. Quelquefois, elles sont directement rattachées à une situation, à une épreuve, quelquefois, l'expression d'un mal - être diffus, peut être plus ancien, enfoui dans nos profondeurs intérieures.
Alors, bien sûr, il est sage d'entendre le message de nos émotions. Comme je l'ai déjà écrit, elles sont comme un clignotant sur le tableau de bord de notre voiture. Il est même opportun, quand la douleur est vive, de se faire accompagner.
Simplement, parfois, la seule chose à faire, c'est de laisser couler la douleur. J'ai envie de prendre l'image d'une vague déferlante, d'une mer déchaînée qui vient frapper contre une digue. Cette digue, c'est toutes ces stratégies, toutes ces résistances que nous mettons en place pour faire face, tenir debout quand la houle est forte. "Tout ce à quoi on résiste persiste" dit -on. Et d'ailleurs, vous l'avez peut être remarqué, la vague revient plus forte, surgit autrement, la digue commence alors à montrer des signes de faiblesse. La vague veut passer et elle finira par passer. Sous une forme ou sous une autre (combien de maux ont une origine émotionnelle ?).
En vérité, nous résistons parce que nous nous voulons forts, parce que nous nous sentons aussi coupables de ne pas pouvoir dépasser cette douleur qui nous étreint, nous assaille . Mais surtout, nous résistons car nous avons peur. A la souffrance initiale, se rajoute insidieusement la peur de souffrir davantage si nous lâchons. La peur d'être submergé, voire emporté par la vague de la douleur. C'est ce que me disait une amie que j'invitais à laisser s'écouler sa peine pour ne pas lui permettre de s'agripper et de perdurer : "si je le faisais, je partirais avec elle". C'est une sensation que nous avons certainement tous vécu : la peur d'ouvrir le barrage et de laisser couler la vague, la peur d'être dépassé, de perdre le contrôle en somme.
C'est la fatigue, l'épuisement - tant la résistance nous coûte en énergie - après des jours, des mois, voire des années qui peut enfin ouvrir les vannes. Ou nous pouvons aussi décider de le faire nous - même, comme un acte de profonde attention envers notre personne. Un acte volontaire, conscient, déterminé. Ne plus résister, voir et même vivre cette image de laisser s'écouler la vague tout en étant confiant que l'on ne sera pas emporté. Juste un observateur, là sur le côté et en même temps évidemment un peu acteur.
Oh, j'en conviens, ce n'est pas un moment très fun. Et en même temps si libérateur. En quelques minutes, passer du fracas des vagues déchaînées contre nos digues au calme. Un calme qui ressemble un peu à un vide. Après tout, ce qui vient de s'écouler prenait forcément de la place. Simplement, pas un vide négatif comme celui du manque. Non, un vide, une vacuité de paix. Et, l'espace ainsi libéré pourra alors inviter à nouveau la vie. Et quoi de mieux que de se sentir habité par l'énergie de vie ?